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L'adulte

L’accès à l’emploi en cas d’autisme

Passé le cap de la scolarité, les personnes autistes de haut niveau ou non, aspirent à une certaine autonomie et à une intégration sociale. Obtenir un emploi est alors une étape importante. Les adultes autistes doivent trouver un emploi adapté à leur profil et à leurs besoins. Autisme Info Service vous donne des conseils pour réussir votre entrée dans le monde du travail.

Quels types d’emploi pour les adultes autistes ?

Un emploi adapté à vos compétences et vos besoins

Votre statut d’adulte autiste nécessite de prendre en compte certains facteurs pour accéder à la vie active. L’emploi pour lequel vous souhaitez postuler doit avant tout correspondre à un de vos centres d’intérêt et à vos compétences. Pensez également que les relations sociales ont souvent une place importante dans la plupart des emplois. Gardez ces éléments en tête lorsque vous consulterez les offres d’emploi. Comparez les compétences requises avec celles que vous pouvez apporter et les éventuelles difficultés que votre handicap pourrait impliquer. Attention toutefois à ne pas vous dévaloriser. Vos différences peuvent être des points forts à mettre en avant : ponctualité, attention aux détails, mémorisation, concentration sur la tâche à effectuer, productivité, etc.

Dans quelles entreprises postuler ?

Selon votre degré d’autonomie, d’expérience et l’importance du trouble du spectre de l’autisme, différentes possibilités s’ouvrent à vous.

L’ESAT (Établissement et service d’aide par le travail) vous permet d’exercer une activité professionnelle dans un environnement protégé et structuré. Les entreprises adaptées (entreprises du milieu ordinaire) emploient principalement des personnes en situation de handicap. Si vous avez obtenu une RQTH (Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé), cet environnement encadré vous permettra de suivre un parcours professionnel tout en bénéficiant d’un accompagnement individualisé. Vous pouvez également postuler dans une entreprise du milieu ordinaire. Sachez que les entreprises de plus de 20 salariés sont soumises à une obligation d’emploi de travailleurs handicapés (OETH).

Exemples de domaines de compétences

Josef Schovanec, philosophe et écrivain autiste, a rendu un rapport au gouvernement dans le cadre du 4e plan autisme. Dans cette étude, il cite certaines activités qui favoriseraient l’insertion professionnelle des personnes autistes :

  • l’armée (analyste de données) ;
  • l’informatique (codeur et développeur web, analyste) ;
  • la rédaction et la traduction ;
  • le contact avec les animaux ;
  • l’art et l’artisanat ;
  • la mécanique, etc.

Se faire accompagner vers l’emploi

Pour une personne autiste, solliciter une personne référente peut apporter une aide précieuse pour faciliter l’accès au monde du travail : une personne impliquée dans une association sur l’autisme, un travailleur social, un job coach… Cet accompagnant vous permettra d’évaluer vos compétences en fonction de l’environnement et des besoins spécifiques d’un poste. Vous bénéficierez d’un accompagnement personnalisé et d’un projet professionnel adaptés à votre profil. Vous pourrez être suivi par ce coach durant différentes phases : recherche d’emploi, entretien d’embauche, maintien dans l’emploi.

Obtenir un emploi : nos conseils

Dossier de candidature, CV et lettre de motivation

Comme tous les postulants à un emploi, les adultes autistes doivent convaincre les recruteurs de leurs compétences.

Avant de rédiger une lettre de motivation et un CV, contactez une personne référente. Elle sera de bon conseil et vous aidera à rédiger ces documents de façon simple et efficace. Structurez bien votre CV pour qu’il reflète vos capacités de travail. Dans votre lettre de motivation, soulignez votre intérêt pour l’emploi que vous sollicitez. Dans un premier temps, ne mentionnez pas votre handicap. L’objectif est de montrer toutes vos compétences aux recruteurs. Vous pourrez aborder le sujet ultérieurement si vous le souhaitez bien entendu, et si votre candidature est retenue.

Vous pouvez également présenter un dossier de candidature plus complet avec des éléments attestant de vos aptitudes (dessins, rapports, photos de réalisations, etc.). Un tel dossier prouvera à l’employeur que vous pouvez fournir un travail de qualité.

L’entretien d’embauche

L’entretien d’embauche reste l’étape la plus déterminante et la plus intimidante de la recherche d’emploi, notamment pour les personnes autistes. En effet, pendant l’entretien, l’employeur se concentre non seulement sur le profil des candidats, mais aussi sur leur attitude, dimension qu’il ne faudra pas négliger. Démontrez votre intérêt pour le poste pour lequel vous postulez tout en mettant en avant vos compétences et vos qualités. N’hésitez pas à vous entrainer très concrètement, à vous mettre en situation pour préparer cet entretien. Demandez à un proche ou à un professionnel de vous soutenir en se mettant par exemple à la place du recruteur.

Si vous êtes suivi par une personne référente (association, coach, etc.), vous pouvez lui proposer de vous accompagner en vous assurant d’avoir l’accord du recruteur. Dans ce cas, ce dernier aura donc forcément connaissance de votre handicap avant l’entretien.

Conserver votre travail

Vous avez réussi à trouver un emploi ? Félicitations ! Pour vous, c’est le début de la vie active. Vous devez maintenant faire vos preuves et arriver au terme de votre période d’essai. Le maintien dans l’emploi nécessite certaines exigences pour tous les employés, et notamment pour les adultes autistes :

  • faire un travail qui répond aux attentes de l’employeur ;
  • entretenir de bonnes relations avec ses collègues et sa direction.

Créez votre propre emploi

Vos particularités sensorielles ou comportementales ne vous permettent pas de travailler en entreprise ? Pourquoi ne pas devenir votre propre employeur ? Pour certains adultes autistes, cette solution est un moyen de réussite sur le plan professionnel et social. En ayant un statut de travailleur indépendant, vous pouvez travailler à domicile ou en tant que consultant, à votre rythme et de manière plus libre. Il vous faudra toutefois redoubler d’efforts et d’organisation pour mener à bien votre projet.  

Pour aller plus loin, des pistes et des conseils complémentaires

Moyennant une bonne compréhension des enjeux, une bonne connaissance de soi, une identification claire de ses besoins et le respect mutuel de quelques règles, concilier autisme (de haut niveau, ex : « syndrome d’asperger ») et épanouissement personnel et professionnel est tout à fait possible.

 

Le dire ou ne pas le dire ?

Le monde du travail peut-être une étape angoissante.

La question récurrente est : faut-il dire ou cacher son diagnostic pour ne pas être exclu d’emblée ?

mais aussi : les adaptations scolaires et universitaires sont-elles déclinables dans le monde du travail ?

peut-on vraiment fonctionner durablement en « infiltré » ?

Ce qui pourrait exclure les candidats autistes du monde du travail, ce n’est pas l’autisme en lui-même, mais sa méconnaissance par les tiers qui peut être préjudiciable dès l’étape du recrutement : l’absence de langage corporel, un regard fuyant, une froideur apparente, l’impossibilité fréquente à répondre à de grandes questions ouvertes sur sa personne et son projet de vie… disqualifient souvent les candidats autistes aux yeux de recruteurs qui, au-delà des compétences, recherchent aussi la chaleur et le dynamisme d’une personne supposée montrer la faculté à s’intégrer dans une équipe.

De nombreuses personnes autistes sont diagnostiquées tardivement, à la suite d’un burn-out cognitif par exemple et qui les écarte un temps du monde du travail, alors même qu’elles avaient acquis un métier ; une découverte tardive, parfois surprenante, qu’il convient d’apprivoiser. Lorsque vient le moment de revenir sur le marché du travail, se pose la question d’annoncer son diagnostic (et comment le dire ?) avec la crainte d’être stigmatisé, ou de ne pas le dire et risquer de faire face tôt ou tard à de nouveaux malentendus professionnels et à un deuxième possible burn-out.

Pour de nombreuses personnes autistes, le problème, en effet, n’est pas tant de trouver un emploi que de le conserver. L’entreprise est un monde social, pétri de rapports et de codes sociaux implicites et fluctuants qui pénalisent les personnes autistes du fait de leurs particularités cognitives.

Dans l’environnement de travail, la pression est de plus en plus forte. Elle conduit à multiplier des contraintes liées au manque de temps et de recul : messages implicites, directives floues, absence de repères dans les processus… pour ne citer que les plus communes.

La balance bénéfice-risque plaide largement en faveur d’annoncer le diagnostic, raison pour laquelle les professionnels chargés de favoriser l’inclusion professionnelle des personnes autistes préconisent d’aborder franchement le monde du travail en tant que telles.

Souvent les personnes autistes s’imaginent pouvoir fonctionner « en infiltrées », mais elles ne se rendent pas forcément compte que bien que leurs interlocuteurs neurotypiques ne le manifestent pas explicitement, leur décalage est tout à fait perceptible.

Sans compréhension de l’origine de ce décalage, le risque est de rechercher une explication qui peut être tout à fait inadaptée, ou de surinterpréter leur maladresse comme une malveillance intentionnelle, qui finira par produire des tensions croissantes.

Dire son diagnostic permet de mettre des mots et du sens sur ce qui se manifestera tôt ou tard. Avec un effet positif paradoxal : un petit décalage non expliqué forme une question latente qui peut devenir un abcès « un tel, il a vraiment un problème… », tandis qu’un plus gros décalage explicité est automatiquement dédramatisé et fini par devenir invisible, dans le bon sens du terme « ah oui, mais c’est parce qu’il est autiste, c’est logique, et ce n’est pas grave ».

Sensibiliser l’environnement de travail à l’autisme en général, et à son mode d’emploi personnel en particulier, permet à vos collègues de vous comprendre, d’apprendre et de solliciter leur bienveillance. Les petites bizarreries éventuelles sont acceptées, et dédramatisées très simplement, dès lors qu’elles sont connues de tous et qu’elles font sens.

Dès le départ, annoncer son diagnostic permet de se donner beaucoup plus de chances de passer victorieusement l’étape du recrutement.

Pour cela, il est possible de s’appuyer sur les structures existantes : les services publics d’aide à l’emploi (accessibles sur notification MDPH et reconnaissance RQTH) ainsi que sur des structures associatives ou privées de job coaching, en lien avec la mission handicap de l’entreprise, et l’AGEFIPH.

Annoncer son diagnostic permet de bénéficier d’un temps d’adaptation plus efficace et adapté au sein de l’entreprise et de solliciter des adaptations, si elles sont nécessaires.

Dans les grandes entreprises, il ne faut pas hésiter à solliciter les missions handicap pour identifier et transmettre vos besoins en termes d’adaptation du poste de travail. Celles-ci dépendent du profil cognitif et sensoriel de chacun et des conditions d’exercice du métier.

En voici quelques exemples non exhaustifs : des horaires adaptées pour aménager sa fatigue et éviter un burn-out, des horaires décalées pour éviter les heures d’affluence dans les transports en commun, travailler dans un bureau plutôt qu’en open-space, pouvoir prendre ses repas en décalé, éviter d’avoir à répondre au téléphone - pour ceux pour qui c’est trop pénible, ou bien, obtenir un téléphone aux fréquences adaptées à ses hyper et hypo acousies (avec l’aide de l’AGEFIPH), ne pas assister à des réunions interminables et/ou qui pourraient être facultatives, privilégier des réunions moins nombreuses et plus cadrées, avoir des consignes explicites, écrites etc.

90% de ces adaptations sont intellectuelles (elles ne nécessitent pas d’investissement matériel coûteux). Une fois mises en place, elles bénéficient à tous.

En mettant des mots et du sens sur vos particularités, cela vous permet de solliciter la bienveillance naturelle de vos collègues : « Voilà comment je fonctionne, mes forces et mes faiblesses. Ne t’inquiète pas si… (dans telle ou telle circonstance)... je peux avoir des réactions un peu décalées ».

 

L’entreprise est un monde social

Avancer à visage découvert offre bien d’autres avantages, comme celui de permettre aux collègues de comprendre pourquoi, par exemple, une personne intellectuellement brillante, peut parfois éprouver des difficultés étonnantes à réaliser des tâches simples.

Une des conséquences de la pensée autistique réside dans la difficulté éprouvée dans le décodage du sens social.

70% de la communication entre deux personnes repose sur des messages sociaux exprimés de façon non verbale, et traités de façon automatique, sans effort conscient.

Le décodage cognitif de la posture corporelle, du ton de la voix, de l’expression du regard et la perception des infimes variations des muscles du visage, permettent d’avoir des repères relativement fiables sur l’état émotionnel de nos interlocuteurs et donc d’adapter notre discours en permanence.

Chez une personne autiste, ce décodage de l’état émotionnel d’autrui fonctionne mal, ou de façon très hétérogène (certains signaux vont paraitre exacerbés, au détriment d’autres signaux) et parfois ce décodage ne fonctionne pas du tout.

Or, avoir des repères fiables, sur l’état émotionnel de ses interlocuteurs, est essentiel pour bien communiquer.

Certaines personnes autistes (ou dans le registre des Troubles du neuro-développement) sont même prosopagnosiques : elles sont dans l’incapacité de reconnaitre un visage. Si un collègue change de bijoux ou de coupe de cheveux, elles perdent leurs repères et sont susceptibles de ne plus les reconnaitre. Décoder le sens social est particulièrement difficile pour une personne qui n’est pas certaine de l’identité de ses interlocuteurs. Mais dès lors que l’équipe est sensibilisée à ces difficultés, les personnes s’adaptent et fournissent d’autres repères à leurs collègues. Surmonter ensemble ces particularités insolites est créateur de lien.

 

Trouver un tuteur dans l’entreprise

C'est une clef de la réussite professionnelle d’une personne autiste. Il s’agit d’un ou d’une collègue de travail avec qui la personne va pouvoir échanger de façon discrète, mais récurrente, pour se faire expliciter tous les codes sociaux trop implicites pour être facilement interprétés.

Ces équipes sont extrêmement performantes, et permettent à des personnes autistes d’occuper parfois des postes très élevés et exigeants, dès lors qu’elles ne sont pas seules à gérer les codes sociaux et qu’elles peuvent s’appuyer sur la bienveillance discrète de collègues.

En retour, ceux-ci bénéficient d’une « vision TSA » du travail (rigueur, exigence, logique, sens du détail, faculté d’hyper concentration) qui peut être extrêmement bénéfique dans l’accomplissement de leurs propres tâches.

Il arrive que des personnes autistes parviennent à trouver spontanément cette aide spécifique dans leur entourage professionnel. Mais du fait de difficultés de compréhension du sens social, beaucoup n’osent pas solliciter ce soutien essentiel à leur épanouissement.

Une inclusion professionnelle réussie suppose de trouver ce tutorat, avec l’aide de la hiérarchie ou bien par l’intermédiaire d’une structure de job coaching. Il fait partie du succès, c’est une courroie de transmission génératrice de bienveillance et d’énergie positive qui bénéficie à tous.